jeudi 14 août 2014

Chant: Lady Day



Dans The Heart of A Woman, l'écrivaine Maya Angelou décrit sa rencontre avec Billie Holiday en 1957 comme une grande déception: elle était grossière, alcoolique et donnait des leçons à tout le monde. 
Mais elle était aussi cette voix un peu éraillée, douce, la voix blessée de tout un peuple, servie d'un merveilleux talent. 
Maya Angelou écrit ses mémoires en toute honnêteté et on aurait pu aisément passer une soirée passionnante avec elle, à l'entendre raconter sa vie incroyable. 
Mais Billie... il faut simplement l'écouter encore et encore en se répétant que le talent n'a pas besoin d'équilibre et ne s'embarrasse pas de l'intelligence du cœur. Elle est elle et c'est bien suffisant.

Lecture: Histoire d'O

Illustration de Leonor Fini, peintre surréaliste (1907-1996)


Cette histoire, lettre d'amour violente à un homme inconnu, appartient à une autre dimension, au delà du monde des fantasmes. O dit "oui" à tous ses maîtres et tortionnaires, ouvre son corps entier à la douleur et à l'asservissement. Dans toute cette noirceur sans limites, l'amour se trouve pourtant à chaque page et ses amants disent à O qu'ils l'aiment et n'en l'aimeront que plus si elle se laisse réduire complètement à l'état d'esclave. 
Florence Montreynaud, avec raison comme toujours, affirme que malgré les apparences, c'est bien cette femme qui se sert des hommes pour assouvir ses pulsions de mort: à la fin, O, abandonnée par son maître, se décide enfin à mourir. 
Ce classique de la littérature érotique n'a pas vieilli et ferait rougir de honte des auteures aussi médiocres que E. L. James. Et ce n'est pas tant ses scènes érotiques que sa véritable signification dans le cœur de chaque femme qui fascine toujours autant aujourd'hui. 
Les illustrations de l'Argentine L. Fini (édition de 1975) correspondent bien à l'univers un brin surréaliste du livre. 

samedi 2 août 2014

Chant: Dmitri et Naples



Depuis des années, la voix profonde de Dmitri Hvorostovsky, sa beauté lointaine m'emportent et mes yeux pleurent. Cette fois-ci, je découvre un air napolitain qui ne me quitte pas depuis quelques jours. 

Composé en 1930 par le napolitain, Rodolfo Falvo, il s'intitule "Dicitencello vuje" ou "dites le lui, vous": 
Un homme déclare son amour à une femme de façon indirecte, en s'adressant à l'une de ses amies. Il lui demande de confier son secret à cette autre jeune fille («Dicitencello a sta cumpagna vosta », dites-le lui vous, à votre amie), du fait qu'il a perdu le sommeil, qu'il ne peut vivre en paix, tant il est tourmenté par cette passion. Ce n'est qu'au dernier couplet de la chanson que le protagoniste, voyant une larme couler sur la joue de son interlocutrice, avoue qu'en réalité, il l'aime elle, et adresse son amour pour la première fois à la seconde personne du singulier (« levammece sta maschera, dicimme 'a verità », Levons ce masque, disons la vérité ; « Te voglio bene... te voglio bene assaje ! », Je t'aime, je t'aime tant !).


Quelques crooners ont repris la mélodie dans les années 1950. Et parce que dans un autre genre, sa voix me fait autant d'effet, voici la version de Dino: